menu

L'EMBARCADERE DES LETTRES - MARSEILLE ET LES ECRIVAINS

DUCHENE REMI
28.00 €
Sur commande
Code EAN : 9782709642736
Editeur : LATTES
Date de parution : 27/03/2013
28.00 €
Sur commande
L'EMBARCADERE DES LETTRES - MARSEILLE ET LES ECRIVAINSExtrait du prologue

Ce livre sur Marseille a été imaginé au nord (un comble), sous le ciel gris du plat pays. Plus précisément, aux Musées royaux des Beaux-Arts de Bruxelles, en 2008, lors d'une rétrospective consacrée à Pierre Alechinsky, le peintre belge d'origine russe. Étrange détour... Sous le titre plaisant «Alechinsky de A à Y», la carrière de l'octogénaire était retracée par des oeuvres venues du monde entier, selon un accrochage qu'il avait lui-même supervisé. L'exposition fournissait également une grande variété de détails biographiques. L'une de ces oeuvres et l'un de ces détails étaient particulièrement fascinants. En 1955, le jeune Alechinsky se rendit au Japon pour étudier la calligraphie et dut, afin de financer son séjour, emporter des tableaux à vendre sur place. Le voici donc, quelques toiles roulées dans ses bagages, embarquant sur le port de la Joliette à bord d'un paquebot de la compagnie des Messageries Maritimes qui, à l'époque, assurait la desserte régulière de la ligne entre Marseille et Yokohama.

Une des toiles vendues par Alechinsky pour s'offrir le séjour au Japon était intitulée La Nuit; elle fut acquise par l'un des plus importants musées japonais d'art occidental, le musée Ohara de Kurashiki. Lorsque cet établissement prêta La Nuit pour la rétrospective de 2008, Alechinsky redécouvrit dans sa ville natale une oeuvre qu'il n'avait plus vue depuis un demi-siècle. La passion de l'octogénaire toujours amoureux de son art, sa joie devant cette Nuit qui, dans la présentation de Bruxelles, était en harmonie parfaite avec les toiles qui étaient à ses côtés {Le Feu, à sa droite, et Migration, à sa gauche), l'enthousiasme typiquement belge qui entourait cet événement simple - sans être anodin -, tout ceci était agréablement contagieux.

Mais pour un Marseillais, il y avait plus encore. Le nom de Marseille, apparu fugitivement dans l'histoire de cette Nuit embarquée à la Joliette, négociée au Japon et revenue à Bruxelles, suffisait à enclencher les mécanismes d'un monde de rêves, d'imaginaire et de lointain. Partir de Marseille vers Yokohama, comme le fit le peintre, c'était encore, en 1955, se lancer dans une traversée de plusieurs semaines qui, après Port-Saïd et le canal de Suez, mettrait le cap sur Colombo, Saigon, Manille, Hong-Kong, avant de toucher enfin l'Extrême-Orient nippon. Revenir à Marseille par la ligne régulière des Messageries Maritimes, compagnie fière d'être présente sur toutes les mers et tous les océans, c'était reprendre pied en Occident; toucher le port phocéen, c'était, comme l'a superbement décrit André Malraux, opérer un changement troublant, retourner vers une civilisation un temps oubliée. Franchir la passerelle, c'était découvrir l'univers. Faire étape à Marseille, déjà apercevoir un autre monde. Bien des voyageurs de la première moitié du XXe siècle, avant que l'avion ne vienne bouleverser ces repères maritimes, ont saisi cet instant magique où la porte de Marseille s'ouvrait sur les mondes lointains: Méditerranée orientale et Maghreb, mais également Afrique noire, océan Indien, Extrême-Orient, Amériques... Les poètes ont été particulièrement sensibles à ce port des rêves dont le seul nom, aujourd'hui encore, fait frémir la corde lyrique des Marseillais et de tous ceux qui aiment cette ville, sous quelque latitude qu'ils se trouvent. Ce livre part à la recherche de l'émotion qui les saisit à la lecture du nom de Marseille sous les plus belles plumes. Les écrivains ont été éloquents, profitons-en; Marseille a été l'embarcadère des lettres, partons les retrouver sur la jetée.

Commentaires (0)

forum
Soyez le premier à déposer un commentaire !
keyboard_arrow_down
expand_less