Tout le monde connaît Diderot romancier, mais non Diderot conteur. Le volume rassemble donc l'ensemble de ses fictions brèves, et un texte théorique, l'Eloge de Richardson. Les Regrets sur ma vieille robe de chambre sont un monologue inclassable, empli d'un humour délicieux, où Diderot évoque le désastre d'un déménagement, symbolisé par la perte d'une vieille robe de chambre, maculée, tachée d'encre : "Les longues raies annonçaient la littérature, l'écrivain, l'homme qui travaille. A présent, j'ai l'air d'un riche fainéant ; on ne sait plus qui je suis." Les Deux Amis de Bourbonne est en douze pages un conte moral chargé d'aventures : "Un peu de morale après un peu de poétique, cela va si bien !" Il ne peut y avoir d'amitié pleine et entière qu'entre "des hommes qui n'ont rien. Un homme est alors toute la fortune de son ami, et son ami est toute la sienne." Au passage, l'auteur a entassé les aventures, défini les trois sortes de contes (merveilleux, plaisant, historique). Ceci n'est pas un conte est, en effet, tiré pour moitié d'une histoire vraie, où le conteur est plaisamment interrompu par le lecteur. Deux trahisons se font suite, d'un homme par une femme, d'une femme par un homme, comme pour montrer qu'il n'y a pas d'amour partagé. Le lecteur, lui, pris par la rapidité, la subtilité, l'intelligence de Diderot, éprouve ce qu'il décrit dans l'Eloge : "Combien cette lecture m'affecta délicieusement ! A chaque instant, je voyais mon bonheur s'abréger d'une page. [...] Cet auteur vous ramène sans cesse aux objets importants de la vie. Plus on le lit, plus on se plaît à le lire." Ce recueil est donc une théorie et une pratique de la littérature et de la lecture, à travers le conte : il fait regretter que Diderot n'en ait pas écrit bien davantage.
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