VISAGES DE L'AUBE

Jamais l'humain n'est si proche de la mort que le jour de sa naissance. La mère expulse l'enfant, mais dans ce corps fripé qui surgit, c'est un destin qui vient au monde : destin aux chemins croisés des rêves de ceux qui enfantent et de la réalité extérieure. Mme Armande le sait bien, elle qui donne vie, chaque nuit, à des enfants qui deviendront ceux qu'elle observe, le jour, dans les bus, la rue, la cour de son immeuble. S'ils avaient su ce qu'ils allaient devenir, seraient-ils venus ? Lys, la petite voisine que Mme Armande a mise au monde il y a tout juste dix-sept ans, a décidé de ne plus se poser la question&

Ce récit de Nancy Huston fait subtilement écho aux bouleversantes photographies de Valérie Winckler. Ces nouveau-nés que l'on a presque le sentiment de pouvoir toucher& on voudrait croire à la magie de leurs premiers regards, mais le tragique est là. Nancy Huston a raison : le silence des nouveau-nés est sidérant. On dirait qu'ils ont quelque chose à taire. --Isabelle Rossignol