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RICHARD COEUR DE LION - TOME 1 L'OMBRE DE SALADIN - VOL01

CALMEL MIREILLE
19.90 €
Sur commande
Code EAN : 9782845635791
Editeur : XO
Date de parution : 14/03/2013
19.90 €
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RICHARD COEUR DE LION - TOME 1 L'OMBRE DE SALADIN - VOL01L'homme était fatigué. Harassé sous le poids d'un fardeau qui ne le quittait que par brefs moments au cours desquels il poussait un soupir bruyant. Par-dessus son haubert à triples mailles, la chlamyde à la croix rouge de l'ordre des chevaliers du Temple s'était voilée de la poussière des chemins. Il avait abandonné son mantel à côté de son épée sur le tabouret de bois où il s'était assis à peine entré dans l'Auberge des Preux. Posés devant lui, un cruchon de vin épicé à sa droite, un gobelet d'étain à sa gauche. Dans la douce clarté d'une lampe à huile, le chevalier vidait l'un en remplissant l'autre, secouant par instants une tête aux cheveux d'un noir luisant qui lui tombaient sur les épaules.
Il n'était pas le seul à éprouver un tel épuisement. Depuis que le sultan Saladin s'était emparé de Jérusalem en 1187, après la bataille de Hattin qui avait vu la mort ou l'emprisonnement des plus illustres chevaliers chrétiens, nombre de places fortes stratégiques, dont Acre, Jaffa, Ascalon et Beyrouth, étaient tombées aux mains des musulmans. Jugeant, à tort, que son principal adversaire, Guy de Lusignan, roi de Jérusalem, ne constituait plus une menace pour lui, Saladin venait de le libérer après deux années de captivité. À l'heure où le chevalier Gontran de Hautefort goûtait à la tranquillité de cette auberge, Guy de Lusignan reconstituait une armée dans le dessein de reprendre Acre. Depuis plus d'un an déjà trois royaumes s'étaient alliés pour prêter main-forte aux chrétiens de Terre sainte. La France sous le commandement de son jeune roi Philippe Auguste, l'Angleterre sous celui d'Henri Plantagenêt et le Saint Empire germanique avec l'empereur Barberousse à sa tête. Mais les semaines avaient succédé aux mois et les monarques, empêtrés dans des luttes intestines, tardaient toujours à se mettre en branle.
Le chevalier de l'ordre du Temple leva un oeil sombre à mon approche. Il m'adressa néanmoins ce sourire avenant qu'il me réservait à chacune de ses visites, lorsque le soir survenait. J'achevai de me sécher les mains à un torchon de toile.
- Vous arrivez bien tard, messire Gontran. Il me reste seulement quelques cuillerées de cette sauce de pois chiches que vous affectionnez.
Les pattes-d'oie de ce regard profond, d'un noir de jais, s'étirèrent un peu plus en oblique.
- Je m'en contenterai, dame Louane, si vous y ajoutez quelques tranches dorées.
Il s'agissait de petites galettes sur lesquelles je tartinais un mélange de blancs neige, de sucre et d'épices avant de les faire griller. Une recette du vieux Mauray de Brocéliande, en terre bretonne, où j'étais née. Une recette que j'avais ressortie du passé en prenant cette auberge avec mon époux Jaufré, huit ans plus tôt, quand nous dûmes admettre que notre exil durerait bien plus longtemps que nous ne l'avions imaginé. Ces fameuses tranches dorées avaient contribué à notre nouvelle renommée. Par manque de denrées, je ne pouvais en cuire que rarement, aussi marquai-je un instant la surprise devant la requête du chevalier, absent de la place depuis quelques jours. Avant de comprendre.
- J'imagine que vous avez croisé le sire de Beaufort en remontant la venelle...
Il s'autorisa un petit rire d'enfant pris sur le fait.
-... qui m'a conseillé de me hâter à moins d'en être privé. Et ma foi, après semblable journée, j'avoue que la perspective de vos pâtisseries m'a fait, quelques minutes durant, le pied plus léger.

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