En juin 1919, la fin de la guerre lui permettant de recouvrer sa liberté, Rilke arrive en Suisse pour ce qu'il pense n'être qu'un bref séjour. C'est à Berne qu'il rencontre Yvonne von Wattenwyl, une jeune femme de vingt-huit ans dont l'amitié attentive et les confidences vont accompagner les dernières années de sa vie. Les trente-deux lettres ici rassemblées sont une source de renseignements sur les dernières années de la vie du poète. Ecrites en allemand pour les deux tiers et conservées à la bibliothèque de la fondation Rilke de Sierre, elles rendent surtout Rilke étonnamment présent. On le verra ainsi confier discrètement ses soucis quotidiens (à commencer par l'expiration de son permis de séjour, que sa qualité d'apatride rend difficile à prolonger et que le mari d'Yvonne von Wattenwyl parvient à faire renouveler), mais aussi évoquer avec pudeur l'état d'inachèvement des Elégies de Duino, décliner l'offre de contrôler personnellement une traduction du Rodin - tout à son attente, Rilke ne veut pas renouer avec ses écrits anciens -,parler aussi de sa quête anxieuse d'un lieu où se fixer durablement. Mais surtout, de lettre en lettre, Rilke ne cache rien ici de sa fragilité, de son besoin de vérité et de sa conscience aiguë de l'irrémédiable.
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