NOUS, LES ENFANTS DE 1928

Préface

Chers enfants de 1928,

Cela fait quelque temps que mes enfants me pressent de coucher par écrit mes souvenirs d'enfance. Je me suis mis à mon ordinateur portable connecté à Internet en Wi-Fi, j'ai lancé un logiciel pour écouter de la musique numérique et, mon téléphone mobile à portée de main, j'ai repensé à ces années où le seul appareil que je possédais était un phonographe à aiguille, sur lequel j'écoutais Fréhel et Ray Ventura. Que la vie a changé depuis ces années d'avant-guerre! Et encore plus, heureusement, depuis ces années de frayeur et de privation dont beaucoup ne sont pas revenus.
Jacques-Olivier, mon fils, et moi avons remanié le premier manuscrit, trop personnel, afin qu'il nous reflète tous, nous les enfants de 1928. Car, que nous soyons français «de souche» ou depuis quelques générations, que nous soyons catholiques, protestants ou juifs, nous avons peu ou prou vécu les mêmes peurs, avons mangé les mêmes topinambours et autres rutabagas. Nous avons attendu dans les mêmes queues devant la boucherie pour obtenir un petit morceau de viande contre un ticket de rationnement. Puis à la fin de l'adolescence, ce fut la libération dans tous les sens du terme. Libération du pays, mais aussi libération des esprits, avec la musique américaine et le cinéma...
Il n'est pas inutile de retrouver ces souvenirs de notre génération au moment où, crise économique oblige, on voit ressurgir des démons qu'on croyait oubliés. L'histoire devrait nous apprendre que la montée des extrémismes ne résout rien. Pire, elle dresse les uns contre les autres, alors que la solidarité devrait au contraire être la valeur suprême.

Sam Baruch et Jacques-Olivier Baruch