Extrait
AU BOUT DU SOUFFLE
Il existe des êtres qui courent la planète pour écrire, vivent des histoires d'amour pour les raconter, mangent en songeant à la recette, travaillent pour gagner de l'argent. Et c'est bien. Ils scénarisent leur vie, ils la rentabilisent.
Puis il y a d'autres personnages, plus improbables, qui écrivent sur leurs voyages quand ils en ont fini avec Tailleurs, qui vivent l'amour en souhaitant ne pas se payer de mots, qui mangent parce qu'ils ont faim, ou pas, et qui travaillent pour de l'argent, mais pas seulement. La vie les balade, la vie les trimballe, sans vraiment se soucier d'eux. Et eux s'en moquent ou font semblant !
Quel est mon camp ? Les histoires de ce livre ne contiennent que la vérité que je leur accorde et les événements dont je me souviens. On ne change pas son passé, mais la mémoire peut le reconstruire. Ces histoires ont ce point commun de se situer précisément là où l'oxygène manque, ou commence à manquer. Là où la terre préfère la neige, la glace et le rocher aux parkings des grandes surfaces.
Ce sont des histoires «à bout de souffle». Pas de héros, pas de vainqueur, quelques vaincus, et toujours de l'espoir, toujours l'envie d'y croire, l'envie que l'amour soit éternel et la vie encore plus. Ces histoires vraies sont nées en Himalaya, en Argentine, en Équateur, en Iran, en Tanzanie, au Spitzberg, en Turquie, au Monténégro, et sur la table de ma salle à manger, avec vue sur la chaîne de Belledonne. Il fait souvent froid dans ces histoires, les protagonistes ont parfois peur, manquent de courage, de lucidité, ou sont bien trop clairvoyants et subtils. Ils sont ballottés par le désir, l'envie de grandir au bout des sommets, ils philosophent en losers, ils ont de la mémoire et du désordre, des rancunes et des pitiés. Ils acceptent les épreuves parce qu'ils n'ont pas eu le choix, et ils savent que tout ceci n'est pas sérieux. Oui, se baladant en tongs sur les sentiers himalayens ou posant la pointe d'un crampon à plus de 7 000 m sur les pentes glacées d'une montagne tibétaine, ils s'efforcent de survivre et de rire, répétant avec Baudelaire : «L'absurde est la grâce des gens qui sont fatigués.» Petites histoires et grosses montagnes, grands amours et petites détresses, douleurs et caresses, pensées et extases, dieux et compagnie : l'ordinaire de ces chroniques, de mes chroniques. L'ambition n'est guère modeste : arracher le vernis de l'extraordinaire pour retrouver le quotidien. Je veux avouer cet amour sans fin pour la nature, dont, jusqu'à preuve du contraire, nous sommes les chantres, sciant malheureusement les branches sur lesquelles nous étions en équilibre instable. Bienvenue au pays des cimes pures et des deux adamantins.
Il existe des êtres qui courent la planète pour écrire, vivent des histoires d'amour pour les raconter, mangent en songeant à la recette, travaillent pour gagner de l'argent. Et c'est bien. Ils scénarisent leur vie, ils la rentabilisent.
Puis il y a d'autres personnages, plus improbables, qui écrivent sur leurs voyages quand ils en ont fini avec Tailleurs, qui vivent l'amour en souhaitant ne pas se payer de mots, qui mangent parce qu'ils ont faim, ou pas, et qui travaillent pour de l'argent, mais pas seulement. La vie les balade, la vie les trimballe, sans vraiment se soucier d'eux. Et eux s'en moquent ou font semblant !
Quel est mon camp ? Les histoires de ce livre ne contiennent que la vérité que je leur accorde et les événements dont je me souviens. On ne change pas son passé, mais la mémoire peut le reconstruire. Ces histoires ont ce point commun de se situer précisément là où l'oxygène manque, ou commence à manquer. Là où la terre préfère la neige, la glace et le rocher aux parkings des grandes surfaces.
Ce sont des histoires «à bout de souffle». Pas de héros, pas de vainqueur, quelques vaincus, et toujours de l'espoir, toujours l'envie d'y croire, l'envie que l'amour soit éternel et la vie encore plus. Ces histoires vraies sont nées en Himalaya, en Argentine, en Équateur, en Iran, en Tanzanie, au Spitzberg, en Turquie, au Monténégro, et sur la table de ma salle à manger, avec vue sur la chaîne de Belledonne. Il fait souvent froid dans ces histoires, les protagonistes ont parfois peur, manquent de courage, de lucidité, ou sont bien trop clairvoyants et subtils. Ils sont ballottés par le désir, l'envie de grandir au bout des sommets, ils philosophent en losers, ils ont de la mémoire et du désordre, des rancunes et des pitiés. Ils acceptent les épreuves parce qu'ils n'ont pas eu le choix, et ils savent que tout ceci n'est pas sérieux. Oui, se baladant en tongs sur les sentiers himalayens ou posant la pointe d'un crampon à plus de 7 000 m sur les pentes glacées d'une montagne tibétaine, ils s'efforcent de survivre et de rire, répétant avec Baudelaire : «L'absurde est la grâce des gens qui sont fatigués.» Petites histoires et grosses montagnes, grands amours et petites détresses, douleurs et caresses, pensées et extases, dieux et compagnie : l'ordinaire de ces chroniques, de mes chroniques. L'ambition n'est guère modeste : arracher le vernis de l'extraordinaire pour retrouver le quotidien. Je veux avouer cet amour sans fin pour la nature, dont, jusqu'à preuve du contraire, nous sommes les chantres, sciant malheureusement les branches sur lesquelles nous étions en équilibre instable. Bienvenue au pays des cimes pures et des deux adamantins.
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