Extrait
Genève
L'ambiance est tendue dans le bloc. Austin n'a jamais assisté à ce genre de cérémonial. Les interventions chirurgicales où il lui fallait tenir les écarteurs pour que l'opérateur puisse s'exprimer, il connaissait. Les séances de réanimation où la tension nerveuse se mêlait au stress et donnait à l'atmosphère son pesant dramaturgique, aussi. Mais là, c'était du jamais vu ! Une première. On allait tenter de refaire battre un coeur qui s'était cristallisé dans un mutisme théoriquement irréversible.
Une aide-soignante prend Austin en charge pour qu'il se déguise en Schtroumpf. Elle lui montre où se déshabiller et où déposer ses affaires puis lui confie un sarrau et des sabots blancs sans lesquels l'accès au bloc chirurgical ne serait autorisé.
«Une fois prêt, vous passez la porte du sas et je vous attends de l'autre côté !» lui précise-t-elle.
Il s'exécute et passe le sas. Elle l'emmène sans plus attendre vers l'une des nombreuses salles aseptisées qui composent cette partie sacralisée du service de chirurgie. Une dernière porte vitrée les bloque. Elle lui donne un bonnet bleu ciel, un masque et, trop petite, se dresse sur la pointe des pieds pour atteindre la sonnette. Le haut-parleur crache quelque chose d'incompréhensible. «C'est Yasmine !»
Comme par magie, la porte vitrée s'ouvre en silence et Austin se sent aussitôt balayé d'un flux d'air laminé. Aline est déjà là, au centre du champ opératoire. Pourtant personne ne la regarde. Le dos tourné, tous sont occupés à préparer le matériel. Elle, trône telle une précieuse momie, sur la table d'opération. Ses bras et ses jambes sont écartelés; son corps est recouvert d'une couverture chauffante en aluminium. Quel choc et quel contraste ! Il l'avait amenée quelques dizaines de minutes plus tôt, engoncée dans sa tenue d'alpiniste avec pour seul équipement médical une pauvre perfusion, une canule dans la bouche et un masque à oxygène. Ce qu'il découvrait maintenant n'avait plus rien à voir. Cinq intervenants cagoules, tous de bleu vêtus, étaient à son chevet et le bloc était encombré d'appareils tous plus sophistiqués les uns que les autres. Deux d'entre eux semblaient concentrés sur sa hanche. Un autre s'affairait sur les boutons d'une grosse machine complexe, et deux autres encore se tenaient près de sa tête pour surveiller ses paramètres vitaux. Austin remarque aussitôt qu'Aline a été intubée, probablement juste avant, au déchoquage ; le respirateur artificiel lui donne déjà l'impression qu'elle revit. Sa poitrine se soulève régulièrement au rythme imposé par le réglage adéquat. Bert Patwolt le voit pénétrer dans le bloc. Apparemment content, il vient aussitôt à sa rencontre. Sa chaleur et son sens de la convivialité mettent tout de suite Austin à l'aise.
«Rentre, Austin, rentre !»
L'ambiance est tendue dans le bloc. Austin n'a jamais assisté à ce genre de cérémonial. Les interventions chirurgicales où il lui fallait tenir les écarteurs pour que l'opérateur puisse s'exprimer, il connaissait. Les séances de réanimation où la tension nerveuse se mêlait au stress et donnait à l'atmosphère son pesant dramaturgique, aussi. Mais là, c'était du jamais vu ! Une première. On allait tenter de refaire battre un coeur qui s'était cristallisé dans un mutisme théoriquement irréversible.
Une aide-soignante prend Austin en charge pour qu'il se déguise en Schtroumpf. Elle lui montre où se déshabiller et où déposer ses affaires puis lui confie un sarrau et des sabots blancs sans lesquels l'accès au bloc chirurgical ne serait autorisé.
«Une fois prêt, vous passez la porte du sas et je vous attends de l'autre côté !» lui précise-t-elle.
Il s'exécute et passe le sas. Elle l'emmène sans plus attendre vers l'une des nombreuses salles aseptisées qui composent cette partie sacralisée du service de chirurgie. Une dernière porte vitrée les bloque. Elle lui donne un bonnet bleu ciel, un masque et, trop petite, se dresse sur la pointe des pieds pour atteindre la sonnette. Le haut-parleur crache quelque chose d'incompréhensible. «C'est Yasmine !»
Comme par magie, la porte vitrée s'ouvre en silence et Austin se sent aussitôt balayé d'un flux d'air laminé. Aline est déjà là, au centre du champ opératoire. Pourtant personne ne la regarde. Le dos tourné, tous sont occupés à préparer le matériel. Elle, trône telle une précieuse momie, sur la table d'opération. Ses bras et ses jambes sont écartelés; son corps est recouvert d'une couverture chauffante en aluminium. Quel choc et quel contraste ! Il l'avait amenée quelques dizaines de minutes plus tôt, engoncée dans sa tenue d'alpiniste avec pour seul équipement médical une pauvre perfusion, une canule dans la bouche et un masque à oxygène. Ce qu'il découvrait maintenant n'avait plus rien à voir. Cinq intervenants cagoules, tous de bleu vêtus, étaient à son chevet et le bloc était encombré d'appareils tous plus sophistiqués les uns que les autres. Deux d'entre eux semblaient concentrés sur sa hanche. Un autre s'affairait sur les boutons d'une grosse machine complexe, et deux autres encore se tenaient près de sa tête pour surveiller ses paramètres vitaux. Austin remarque aussitôt qu'Aline a été intubée, probablement juste avant, au déchoquage ; le respirateur artificiel lui donne déjà l'impression qu'elle revit. Sa poitrine se soulève régulièrement au rythme imposé par le réglage adéquat. Bert Patwolt le voit pénétrer dans le bloc. Apparemment content, il vient aussitôt à sa rencontre. Sa chaleur et son sens de la convivialité mettent tout de suite Austin à l'aise.
«Rentre, Austin, rentre !»
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